Résumés des mémoires

HERRMANN Magali, Le CICR et la Guerre d'Algérie. Une guerre sans nom, des prisonniers sans statut: 1954-1958

Pendant une guerre sans nom, comment défendre des prisonniers sans statut ? Durant le conflit algérien (1954-1962), il n'y eut jamais de déclaration de guerre officielle. L'absence de statut de guerre laisse longtemps les prisonniers algériens et les victimes civiles dans un abandon légal lourd de conséquences. Une semaine après les premiers attentats de la Toussaint 1954, le CICR, inquiet des échos lui parvenant d'Algérie, se demande en quels termes proposer au gouvernement français une intervention de sa part. Se souvenant du refus de la France d'autoriser le CICR à pénétrer en Tunisie en 1953, le Comité pressent que les autorités françaises vont se montrer récalcitrantes à une éventuelle action algérienne. Il s'agit dès lors pour le CICR de négocier rapidement les modalités d'une première mission, autorisée par Pierre Mendès France en février 1955. Mais en l'absence d'un état de guerre, les récentes Conventions de Genève de 1949, pourtant ratifiées par la France, ne peuvent être appliquées. Pour la République française, permettre l'application des Conventions de Genève reviendrait à reconnaître l'état de guerre en Algérie. Ce flou légal donne une impulsion qui va durer bien au-delà des années de guerre algérienne : le CICR envisage d'étendre sa capacité d'action dans les conflits non internationaux, une réflexion qui aboutira à la rédaction des Protocoles additionnels de 1977. Le CICR prend également contact, dès 1956 au Caire, avec les responsables du FLN. Ce dernier, cherchant l'attention et l'approbation de l'opinion internationale, se déclare prêt à respecter les Conventions de Genève, mais uniquement sous réserve de réciprocité de la part de la France. Le CICR se retrouve coincé entre deux feux. Il ne peut passer outre les directives de la France, mais ne peut également pas traiter le FLN en parent pauvre, sous peine de mettre en danger aussi bien les prisonniers français que la sécurité de ses propres délégués. Les dés d'un jeu diplomatique sont lancés.

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